« On ne comprend pas pourquoi, au XXIe siècle, on fait dormir des hommes sur des planches en bois en guise de punition. » — ancien prisonnier politique
Le Centre de défense des droits humains « Viasna » publie le récit d’un ancien prisonnier politique du centre de détention n °15 de Mahilioù (son nom n’est pas donné pour des raisons de confidentialité) sur les conditions de détention en cellule d’isolement. De nombreux prisonniers politiques sont placés à l’isolement à titre « préventif » avant d’être envoyés en centre de détention.
« L’isolement est rude, bien sûr, mais si vous le prenez comme une sorte d’expérience, vous pouvez vous en sortir. Le bon côté de la chose est que vous savez que vous serez libéré dans un certain nombre de jours. À la fin de ce délai, parfois, vous êtes inquiet de savoir si vous allez être libéré, mais même s’ils prolongent, vous savez que ça se terminera. Certains restent là-bas pour « mariner » pendant des jours interminables, mais, en général, il s’agit de prisonniers politiques « de haut vol ». Les gardiens grondent, peuvent taper des pieds sur la porte, vous fouiller avec brutalité lors des inspections. Mais je ne les ai rien vus faire hors du protocole. Je n’ai pas remarqué de nuisance particulière à mon égard.
La literie — le matelas et le linge de maison — n’est pas fournie à l’isolement. Bien sûr, on ne comprend pas pourquoi, au XXIe siècle, on fait dormir des hommes sur des planches en bois en guise de punition. C’est comme si le temps s’était arrêté et que toutes les procédures dataient de l’époque soviétique — des années 30. En hiver, vous pouvez porter des sous-vêtements thermiques, mais vous n’aurez pas de caleçon, et devrez aller à l’isolement sans, car la tenue d’hiver en cellule d’isolement n’en prévoit pas.
Ce sont des choses très étranges. À la limite du ridicule et du choquant.
Vous ne pouvez pas apporter votre propre nourriture à l’isolement, mais les portions étaient suffisantes. Surtout dans сes conditions, où les mouvements sont restreints.
En cellule d’isolement, le moment le plus difficile est la mi-saison, lorsque le chauffage est déjà éteint mais que l’été n’est pas encore là. Il fait particulièrement froid dans les cellules à cette période, vous vous réveillez la nuit à cause du froid et bougez pour vous réchauffer. D’autant plus que c’est le moment où l’on passe à l’uniforme d’été, qui ne comporte pas de sous-vêtements thermiques. Mais qui inclut au moins un caleçon. Ces conditions ne valent pas seulement pour les prisonniers politiques, mais pour tous les prisonniers. C’est juste que les prisonniers politiques ont en général plus de chances de se retrouver à l’isolement, et en particulier à cette période. Là-bas, les détenus faisaient des pompes pour essayer se réchauffer. »